L'histoire du Swift

Connaître l'histoire du Swift Permet d'en connaître davantage sur ses performances et ses capacités, à tel point que la plupart de ce qui est écrit ci dessous aurait très bien pu trouver sa place dans la rubrique "Caractéristiques Techniques".

Histoire

Ce planeur représente le mariage de deux projets au buts très similaires, et entreprit par deux groupes ayant une approche et des compétences différentes.

En Janvier 1986, Brian Robbins,Craig Catto, et Eric Beckman projettent de construire un nouveau deltaplane avec de meilleures performances comparées à ceux disponibles sur le marché.
Sous le nom de la société Bright-Star hang glider, ils commencent le développement de l'Odyssey, un delta rigide.
L'Odyssey utilisait un bord d'attaque en « D » en fibre de verre, kevlar, et fibre de carbone, ainsi que des nervures en Aluminium et mousse qui supportaient une peau en mylar.
Le 1er prototype a été terminé en mars 1986.
Les tests sur véhicule  ainsi que les essais en vol ont eu un développement rapide les deux années suivantes.
Brian Porter a rejoint le projet en devenant « team pilote » en 1988 et a emmené l'appareil à la 1er place des championnats nationaux américain en 1989.
Malgré ce succès, il restait évident que l'on pouvait faire encore mieux dans le développement de la performance des deltaplanes rigides.

2 heures au sud de Bright star, à l'université de Stanford, le projet de dessiner un planeur de haute performance avec un cahier des charges similaire à celui de Bright-Star courait déjà depuis 1985.
Llan Kroo, professeur au département aéronautique, avait obtenu de Stanford des crédits pour débuter des recherches préliminaires. Rapidement un groupe d'étudiants déjà confirmé commença à développer des modèles informatiques générant beaucoup d'archives et créant quelques concepts et idées aérodynamiques très intéressantes.
Les performances estimées paraissaient impressionnantes, les calculs et les projections aérodynamiques n'avaient jamais été développé aussi minutieusement pour un planeur, mais le temps de construire « l'expérience » arrivait.

Suite à une rencontre inopiné, un partenariat entre Bright-Star et l'université de Stanford fut développé. En mélangeant les compétences de chacuns des partis, il devenait évident qu'il était possible de créer un appareil d'un tout nouveau genre alliant les performances et la sécurité d'un planeur à la maniabilité et la facilité de mise en oeuvre d'un delta.

Quatre mois plus tard, en décembre 1989, le Swift 1er génération pris l'air au dessus de la petite colline de « marin county ».

Design Aérodynamique

La conception du Swift a commencé avec l'étude des performances nécessaires pour le vol de distance.
Llan avait écrit un article en 1982, parut dans « hang gliding magazine » décrivant quel sorte de planeur était nécessaire pour de grand vol de distance basé sur l'étude de la distribution des thermiques et des « dégueulantes » inter-thermiques réalisée par Dick Johnson.
L'une des conclusions de cette étude était que des finesses de 15 à 18 points, en présence de  « dégueulantes » inter-thermiques de 1m/s, étaient nécessaires pour réaliser ce genre de vol facilement.

A cette époque, seulement une douzaine de vol de plus de 150 km avaient été effectués en delta plane.
De nos jours quelques vols de 600 a 700 kms ont été réalisés, mais la plupart des pilotes (même expérimentés) n'ont pas volé plus de 200 kms.
Un des facteur limitant pour les vols de distance est la vitesse.
Les thermiques sont en général rencontrés sur une partie plutôt limitée de la journée ,et si vous voulez parcourir une grande distance cela sera logiquement plus long avec un aéronef lent.
De plus, les long vols de distance ne requièrent pas seulement une bonne finesse mais également la capacité à remonter le vent ou fuir une zone de descendance rapidement. Là encore la vitesse est prépondérante.
Avoir à la fois une bonne vitesse ainsi qu'une bonne finesse est aisée sur un aéronef n'ayant pas de limite de poids et d'envergure. Mais si l'appareil doit être à la fois assez léger et lent pour être décollable à pied, et avoir une envergure limitée pour accéder au site de vol libre (tout les sites n'offre pas 30m de dégagement!) cela devient plus difficile.
Un affinage des données de Johnson et une observation des relevés barographiques de George Worthington, un bon pilote de l'époque, ont permis d'estimer que c'était tout juste réalisable.

Un cahier des charges fut établi, et le travail commença pour définir la géométrie de l'appareil:


1- taux de chute minimum en virage sur un rayon de 30m: 1m/s .
2- finesse max: 20:1 (maintenant 27:1)
3- finesse a 120 km/h: 15:1 (aussi en progression)
4- vitesse de décrochage: pas plus haute que les deltaplanes existant pour un décollage à pied en sécurité . (avec les choix aérodynamiques effectués le décrochage et la vrille n'interviennent pas en condition standard!)
5- poids: moins de 80kg . (actuellement moins de 50kg)
6- maniabilité exceptionnelle  pour un vol sûr aux basses vitesses.

La 4eme contrainte signifiait que même avec de larges volets, la surface devrait être comprise entre 11 et 13 m2 (pour une question de charge alaire) .
Avec cette contrainte, le 3eme but devient très difficile à atteindre , nécessitant un aérodynamisme irréprochable.

Etude de configuration

Si tout est bien conçu, les performances d'un planeur sont d'abord définies par son envergure, sa surface et son profil. La sélections de la configuration, qu'elle soit conventionnelle, canard, sans queue ou quoi que ce soit d'autre, est choisie d'abord pour des questions tel que : coté pratique, maniabilité, fabriquabilité, transportabilité etc...
Dans le développement du swift, de nombreuses configurations ont été étudiées. Les résultats ont indiqué de faibles variations de performance entres les différentes configurations.
La configuration conventionnelle,  adaptée au décollage et à l'atterrissage à pied, nécessitait d'avoir une longueur de queue trop courte.
La stabilité directionnelle de la configuration canard était trop peu satisfaisante  à cause du balayage continu du stabilisateur.
La configuration sans queue est naturellement équilibrée, compacte, et ne souffre pas de la pénalité de poids qui serait associée à une queue.
La plupart des inconvénients bien connus des aéronefs sans queue furent contournés par un aérodynamisme soigné et par quelques adaptations ingénieuses.
La stabilisation de l'aile a été obtenue grâce à un vrillage négatif en bout de plume.
La perte de performance associée a été gommée grâce à la possibilité de faire varier le vrillage effectif avec les surfaces de contrôles (volets, ailerons) en jouant sur l'incidence du centre de l'aile jusqu'au bout de plume . Les volets, qui dans ce cas jouent le rôle de trims, courent sur 45% de l'envergure.
Quand on dévie vers le bas le gros de la portance, le nez de l'aile monte et ralenti la machine.
Il est ainsi possible de trimer jusque 45° pour l'approche et l'atterrissage. Détruisant ainsi la finesse, la ramenant à une valeur plus « évidente » pour ces phases là, il est possible de ralentir suffisamment pour envisager un décollage ou un atterrissage à pieds si désiré.
Cette utilisation des volets comme trims a donné à l'aéronef son nom: Le S.W.I.F.T. Pour : stand for Swept Wing with Inboard Flap for Trim.

Contrôle et stabilité

Tous ceux qui ont déjà essayé de voler avec un delta rigide de 13 mètres d'envergure confirmeront: la performance n'est pas utilisable si l'aile n'est pas maniable.
L'un des buts premier de ce projet était d'obtenir la plus grande maniabilité possible pour un planeur décollable à pied. Et la plupart des caractéristiques du Swift vont dans le sens de la stabilité et de la manoeuvrabilité.
La grande corde de la plume apporte un appui supplémentaire qui augmente la stabilité dynamique et réduit la possibilité de tumbling en conditions extrêmes. Cela donne également aux élevons une autorité accrue, spécialement à basse vitesse.
L'usage d'un contrôle aérodynamique de la voilure (le manche latéral) fait qu'il est possible de piloter l'aile sur une très grande plage de vitesse , et ce sans efforts extrêmes. De plus, cela donne une pilotage très efficace en conditions turbulentes quand le besoin s'en fait sentir.
Les Winglets augmentent également l'envergure effective, et, plus important, leur présence améliorent encore l'efficacité des élevons en créant un moment de lacet favorable qui permet de piloter sur deux axes.

Bien que le Swift ait été originalement conçu pour être piloté en deux axes , un troisième axe a été rajouté en 1998 sur les winglets, apportant ainsi encore plus d'autorité et de manoeuvrabilité. La possibilité de dégagement près du relief est ainsi accrue, ce qui apporte un bénéfice supplémentaire en terme de sécurité.
En actionnant simultanément les deux winglets, ce n'est pas loin d'un mètre carré de surface qui se déploie perpendiculairement au sens de la marche. L'effet aérofrein est ainsi très efficace.
La taille des winglets et des élevons a été déterminée par simulation informatique et validée par différents tests sur des maquettes radio commandées.

Dévellopement du profil

Le Profil a été dessiné par l'université de Stanford spécialement pour le Swift.
Les sections ont un faible coefficient de moment et ont été conçus pour opérer dans une fourchette de nombre de Reynolds de 700000 à 2000000.
Ce profil utilise un écoulement laminaire sur les 25 premiers % de la corde, mais a été étudié pour ne pas trop perdre en performances si le flux est perturbé par la pluie ou des irrégularités de surface.

L'épaisseur du profil au niveau des gonds des volets et élevons était a l'origine plus large pour apporter de la résistance à ce niveau là. Les tests sur le premier prototype ont révélés que la résistance dans cette région n'était pas un problème, mais que la traînée crée lors de la déflection du flux par les surfaces augmentait beaucoup trop. Le profil a donc été re-dessiné et le bord de fuite a été affiné solutionnant ainsi le problème.

Optimisation de l'aile

L'étape final pour fixer définitivement un choix sur la forme et l'aérodynamique du swift impliquait une savante alchimie entre flèche, vrillage, taille des volets, taille des élevons, centrage, charge alaire, surface, envergure etc... Un changement qui aurait été bénéfique pour les performances à hautes vitesses aurait pu dégrader sa capacité à enrouler le thermique, ou augmenter la vitesse de décrochage au dessus des limites acceptables.
Le compromis final a été fait par la simulation d'un long vol de distance sur ordinateur en utilisant un optimisateur numérique, qui a finalisé les choix aérodynamiques en compilant les meilleurs caractéristiques de vol.
La simulation incluait la modélisation des thermiques, des dégueulantes inter-thermiques, et une analyse relativement complète de tout le design du swift.

Dessin structurel et construction

La Structure du Swift a été dessinée pour conjuguer légèreté et faible traîné (structure autoporteuse, profil soigné pour un écoulement laminaire , cockpit caréné...).
La structure de l'aile utilise  un bord d'attaque en « D » qui couvre les 25 premiers % de la corde, avec des nervures qui se projettent vers l'arrière en direction des surfaces de contrôle jusque 75% de la corde.

Le premier prototype a été construit avec un tube d'aluminium en « D » et couvert en mylar pour réduire les coûts et le temps de construction. Cela a permis de valider et de soigner le design avant de construire les moules pour la production en série.

La charge utile possible pour cette aile est très large.

Du fait de la faible charge alaire et de la capacité en vitesse de la machine, les effets d'une rafale sont amplifiés. Pour correspondre aux critères de sécurité FAA le planeur doit être capable de supporter des rafales verticales positives ou négatives de 8m/s à la VNE, soit 120 km/h.
La résistance requise est alors autour de 6G, et l'aile du Swift actuelle a été testé jusque +8,7 & -6 G.

La cabine de pilotage est un autre élément important du design. Basé sur l'expérience de Brian Porter avec le Voyager et l'Odyssey, un fuselage complètement caréné a été construit en Carbone et tube Aluminium, puis finalisé en feuilles de Lexan.

Au décollage, le pilote supporte l'aile grâce à des sangles d'épaules, et en vol un hamac emporte le pilote qui referme ainsi le carénage sous lui.

Test sur Véhicule et en vol

Le premier prototype fut monté sur le toit de la camionnette de Brian Robbin et équipé d'instruments capables de mesurer la portance totale. Le planeur était libre en tangage et les élevons au neutre de manière à ce que les variations de portance en fonction des « trims » puissent être mesurées.

Le planeur fut également « assuré » de manière à pouvoir observer à quel moment le décrochage interviendrait et ainsi ajuster le vortillon si nécessaire. Hormis quelques soucis associés à la trop large fente due aux gonds des larges volets (éliminés sur le second prototype!), les tests apportèrent de nombreuses bonnes surprises, et les tests en vol débutèrent en décembre 1989.
Eric et Brian effectuèrent les premiers vols depuis une petite colline de 15 mètres à « marin county ».

Les élevons rendaient le contrôle au sol très facile et l'aile pouvait être aisément pilotée au sol malgré la faible brise de ce jour. Malgré la grosse charge alaire du prototype, le décollage n'était pas difficile et les quelques petits vols d'essais démontrèrent que l'aile était stable, contrôlable, avec un plané plutôt correct.
Des vols depuis le mont Tamalpais et Funston au nord de la côte californienne suivirent rapidement.
Les pilotes apprenèrent d'avantage sur les performances et la manoeuvrabilité de l'appareil.

Le 1er prototype avait un excellent plané à haute vitesse, mais même avec les volets ne faisait encore guère mieux en taux de chute mini que les autres ailes souples de performances. La réponse en roulis n'était pas non plus aussi satisfaisante que Eric l'aurait souhaité.
Un second prototype fut donc commencé: une aile avec des surfaces de contrôle agrandis, un profil légèrement revisité, des winglets améliorés et un peu moins de surface.
Les premiers vols au mont Funston démontrèrent que toutes ces améliorations furent bénéfiques.

Ainsi,  après une dizaine d'heures de vol l'équipe était plutôt satisfaite du résultat. L'appareil avait volé dans des conditions relativement turbulentes, surclassant toutes les ailes souples avec une marge confortable, et surtout apportant beaucoup de plaisir de vol aux pilotes.
Mais le vol sur site est une chose, le vol de distance en est une autre.

Pour déterminer les réelles performances et la maniabilité de l'appareil il fut emporté dans une vrai zone de cross country: Owen's valley.
Avec tous les gadgets habituels du pilote: radio et instruments, oxygène, parachute de secours, eau... le Swift décolla à « horseshoe meadows » à 3300 mètres d'altitude avec un Poids total volant de 150 kg.
Ce jour là les pilotes les plus précoces décollèrent à 10 heures du matin mais Eric attendit 11 heures pour s'élancer, ce qui est plutôt tard pour les standards de ce site, en volant au nord le long de la chaîne de montagne. Avant Bishop il avait doublé toutes les ailes souples. Continuant toujours plus au nord il traversa la vallée des « whites mountains » et  finit par être plus haut que les sommets quand il commença à se sentir en hypoxie (une obstruction dans le circuit d'oxygène fut trouvé plus tard.). Il décida donc d'interrompre son vol et d'aller se poser. Il restait encore quelques heures de convection quand il atterri à « Minas » après avoir couvert environ 230 km. L'idée d'un vrai planeur décollable à pieds avait finalement abouti!

L'ère Aériane

Bright-Star à donc produit une cinquantaine de Swift en série, en version composite.
Puis la société c'est finalement tourné vers le développement d'un appareil encore plus repliable mais de performances moindres: le Millénium.

Le 21 mars 1989 Vincent Piret, ingénieur ECAM (arts et métiers) & Bernard Bleeckx, technicien en matériaux composites, tombent sous le charme du Swift et décident de créer leur entreprise: Aériane. Ils allient leurs compétences dans le but de vivre leur passion: Fabriquer la plus belle et la plus performante machine de vol libre jamais imaginée et construite.
Dans un premier temps ils rachètent à Bright-Star les droits pour produire et distribuer le Swift en Europe.
Ainsi ils produisent 110 Swift sur une périodes de 18 années.
Ils vont durant cette période diversifier les utilisations possibles de la machine.
Une version biplace destiné à l'usage exclusif de l'écolage est créer.
Différentes motorisations vont être adaptées à la cellule du swift le transformant par la même en l'un des motoplaneurs les moins cher du marché et l'un des moins contraignant: Pour le transport, le stockage et surtout le redémarrage en l'air.
Puis Bright-Star ayant complètement cessé son activité Aériane reprend la production au niveau mondial.

Conséquence de l'évolution des matériaux, de leurs compétences techniques acquisent au fil du temps et de leurs grande expérience du Swift de première génération ils décident d'améliorer encore le concept.
Ils créent le Swift light.
L'architecture interne est amélioré, la résistance conservé mais le poids de la machine est abaissé à 46Kg harnais compris!
Les Winglets au lieu d'être à angle droit par rapport au plan de l'aile sont inclinés de 22° vers l'extérieur, l'envergure, l'allongement, la surface projetée s'en trouvent agrandis sans que la surface mouillée n'ait changé.
Il en résulte bien évidement une augmentation des performances de l'appareil, mais en se faisant le centre de poussé a migré et le centre de gravité n'est plus au même endroit.
C'est donc la cage qui va à sont tour subir de profondes modifications:

L'ancienne cage n'était pas repliable, la nouvelle si.
La visibilité est améliorée, la position est légèrement plus redressée et les pieds sont descendus dans le champs de vision.
Un troisième axe est rajouté ce qui permet un pilotage à la fois plus fin et plus efficace quand le besoin s'en fait ressentir, de plus les winglets peuvent être actionnés simultanément faisant alors office d'aérofreins et de stabilisateur (du fait de leurs position très en arrière).

L'avenir

En parallèle des autres activités d'Aériane (l'entreprise est reconnu comme étant experte dans le domaine des matériaux composites et est souvent sollicité dans des emplois très variés: aviation, électro-ménagé,médical, exploration polaire etc...) la mise au point d'une version électrique est en cours...
Et maintenant Les deux compères se prennent à rêver au développement d'un « super Swift » à l'envergure agrandie et au performances encore plus importantes...

Affaire à suivre...